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Le sens oublié
Il y a en graphisme un sens utilisé depuis la nuit des temps mais que l'on oublie à chaque révolution technique à cause de l'afflux de nouveaux moyens et la richesse des possibilités. On voit donc souvent aujourd'hui des brouillards de chiffres indébrouillables, des cartes où l'on ne sait plus où l'on est, des galaxies de camemberts, des légendes qui prennent plus de place que les images, des titres à rallonge avec sous-titres et sous-sous-titres, des armées mexicaines d'histogrammes et des grandes armadas de courbes de toutes les couleurs ... L'équipe graphique ou conceptrice est très contente de l'immense boulot réalisé mais le lectorat, lui, a fui au premier regard. Pourquoi ? Parce que l'on a oublié le sens de la hiérarchisation et la tradition de prémachage qui va avec.
La règle des 2 secondes
Car tout se joue au premier regard. Nos yeux ne veulent pas se fatiguer : dans tout ce que nous voyons, nous faisons des choix basés sur nos expériences et nos habitudes et n'utilisons vraiment qu'une toute petite partie de ce que nous pourrions voir (1). Dans leur grande magnanimité, nos yeux vont donc accorder une seconde d'attention s'ils sont en mode normal, deux s'ils sont exceptionnellement en mode intéressé d'avance. Si pendant ces une ou deux secondes, ils ne captent pas quelque chose qui les accroche et les pousse à rester un peu, c'est perdu, ils vont aussitôt aller voir ailleurs.
Segmentation ...
Pour accrocher ces yeux baladeurs, on va donc hiérarchiser. Hiérarchiser, c'est d'abord être conscient qu'il va falloir segmenter l'information par niveau comme un escalier dont les premières marches sont basses et tapissées avant de devenir plus fonctionnelles une fois qu'on s'y est engagé et même carrément austères si on veut monter sous les toits : d'abord ce qui accroche (le produit d'appel, le slogan, l'image choc), ensuite ce qui incite à aller plus loin en expliquant en très gros de quoi il s'agit (le menu, le sommaire, les grands points à retenir), enfin et seulement alors l'information telle quelle.
… et inégalisation
Une fois ce nombre de niveaux décidé (qui dépend bien sûr de la place qu'on a et de la quantité d'information obligatoire à faire passer), il s'agit de les inégaliser selon la priorité à être capté. Mais aussi inégaliser les informations à chaque niveau pour continuer à guider le regard : si on a deux informations à faire passer, l'une va prendre au moins les deux tiers de la place, l'autre le reste. Si on a deux visuels, pareil. Mais cette inégalisation n'est pas seulement spatiale, elle peut être aussi chronologique avec le très important au début d'un texte, le moins important ensuite. Elle peut être d'intensité en s'aidant de tout ce qui va permettre à l'œil de capter plus facilement qu'il doit d'abord aller là et ensuite ailleurs : typo grasse, colorée ou augmentée, individualisation d'un élément graphique par l'épaisseur ou la couleur, choix d'un élément humain au milieu de représentations abstraites (nos yeux cherchent d'autres yeux). Cette inégalisation peut enfin être de facilité avec un effort particulier dans les niveaux prioritaires pour articuler typo et visuel, utiliser un langage courant, simplifier les alternatives : moins il y a de couleurs, de typos différentes, de types de traitements, plus vite l'œil ira au but indiqué.
Sachant que le meilleur test est toujours de faire regarder le résultat à quelqu'un de pas du tout intéressé (ni concerné par le boulot) et de lui demander au bout de quelques secondes : « Ça parle de quoi ? ». Si ce quelqu'un a compris de quoi ça parle, on peut considérer que le plus dur est fait et que la hiérarchisation a fonctionné.
(1) Voir le livre du neurologue Lionel Naccache : Le cinéma intérieur. Projection privée au cœur de la conscience, Odile Jacob, 2020. Il y dit en avant-propos : « Dès que nous ouvrons les yeux sur le monde, littéralement, notre machine à fictions se met en branle. Il existe ainsi en nous une sorte de cinéma intérieur qui s'apparente au cinéma tout court par de très surprenantes similitudes, mais qui s'en distingue également par d'incroyables prouesses ».